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LA CULOTTE EN JERSEY DE SOIE

— Si tu gueules, petit chameau, on va te faire comme à la Mélie…

C’était une femme des Ruelles qu’on avait trouvée assassinée peu auparavant. Un mois, les journaux en avaient parlé.

Je me débats en silence, farouchement, secouant cette grappe d’hommes accrochés à mon corps. Trois minutes il me semble que je remue le monde entier dans une frénésie désespérée…

Mais soudain celui qui me tenait par les hanches se baisse et me prend par les jambes. Il soulève. Je vacille et n’ai plus d’appui au sol, si les autres ne me retenaient, je me briserais à terre. Je cesse de me défendre. Je suis épuisée et mon cœur saute dans ma poitrine comme je bondissais aux mains des trois hommes.

Je recommence un cri. Ma voix, qui ne me semble pas sortir de ma poitrine, s’élève et monte en l’air.

Une large main descend sur mon visage et coupe mon appel. Je recommence à me secouer comme le sanglier coiffé par la meute, mais je suis à la limite de mes forces. C’est fini ? Il me semble que mes membres deviennent cotonneux, une douleur affaiblissante se glisse dans mes articulations, si je me remettais debout mes jambes ne me porteraient plus.

— Elle a du sang, la gosse, dit l’un des soldats…

— Tu parles, répond l’autre. Elle m’a balancé un coup de fesses que j’ai cru aller à dame…

— Et à moi un coup de tige dans le bide, j’ai pensé que ça ressortait de l’autre côté…

— On va rigoler avec elle ?

— Ça colle…

— Emmenons-là chez la mère Gigot…

— Qui c’est, tu crois ?

— Une môme du bocard à côté…

— Penses-tu ?