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LA CULOTTE EN JERSEY DE SOIE

tude à leur conscience qui pourrait être troublée malgré tout, la plupart des mâles, quoique la prisant fort pour leur usage, diminuent, en paroles, la valeur réelle de la chasteté des fillettes. Ils répandent des bruits grotesques et grossiers, ils publient des livres, ils font une propagande acharnée, par le théâtre, le roman et les propos de salon, pour qu’il soit bien avéré qu’il n’y a vraiment pas tant de ménagements à prendre avec les adolescentes ; celles-ci étant gangrenées par mille causes : les ouvrières des quartiers pauvres, par les exemples et la promiscuité (Hélas ! trop certaine), les rurales, par l’exemple des bêtes, et les jeunes filles de la bourgeoisie par les vices solitaires ou unisexuels. À entendre un tas de moralistes de fantaisie il n’y aurait pas cinq sur cent de jeunes filles qui seraient pures, je veux dire sans rêves galants.

— C’est idiot…

— Évidemment. Les questions sexuelles n’éveillent que rarement le cœur des adolescentes, sauf lorsqu’intervient à la maison quelque garçon de leur âge et qui met en pratique la « morale » paternelle : le cousin des romans. Quant aux sens il n’y en a pas une sur dix mille dans la bourgeoisie pour en avoir avant vingt cinq ans.

— C’est certain, ce que tu dis là. Seule je crois de nous toutes à avoir vécu au couvent de six à dix-sept ans j’ai vu tout ce qu’on pouvait voir et puis en parler…

— Et qu’as-tu vu ?

— Rien du tout. Durant onze ans j’ai passé dans tous les dortoirs et j’ai connus toutes sortes de caractères. J’ai vu des nonnes certainement douées de tempérament, j’ai eu comme amies des jeunes filles qui avaient tout ce qu’il faut pour devenir d’expertes courtisanes… Après éducation, s’entend,