Page:Renee Dunan Une môme dessalée 1927.djvu/12

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Elle toisa d’un air dégoûté le personnage audacieux, puis dit à haute voix :

— Il y a des types pleins de culot qui vous pelotent à l’œil, faute de bulle. Moi, je vais les dresser ces gonses-là.

Le nouveau venu tint tête et sérieusement répondit :

— Si c’est pour moi, ma petite, votre vanne, pas besoin de se fâcher. Vous pourrez me dresser tant que vous voudrez. J’adore ça !

Les deux compagnes de Zine, lâchement, se mirent à rire, elle les injuria :

— Dites donc, vous, il en faut peu pour vous mettre à la rigolade. La première face d’oie qui renifle suffit. Oh ! là là !…

La brune amoureuse rétorqua :

— Dame ! tu voulais le dresser, il ne demande que ça.

— Ta gueule ! grogna Zine, il y a dresser et dresser. Comme il veut dire, à part les rombières de cent piges, personne ne voudrait s’y salir.

L’homme furieux, riposta.

— Regardez-moi cette crâneuse, ça veut étaler et c’est encore au biberon. Je parie qu’elle a encore son pucelage.

Zine rougit. La riposte était dure. De fait, elle voulait étourdir tout un chacun de ses paroles audacieuses, et, au fond, ce n’était qu’une pauvre petite pucelle de rien du tout. Les essais fréquents qu’elle avait faits de son corps, depuis ses dix ans, n’avaient jamais abouti à un résultat certain et visible.

Elle dit à voix basse :

— Je l’aurai, ce type-là.

Et renvoyant sa vengeance à l’avenir, écarlate de rage et plus raide, parmi les buveurs narquois, qu’une reine visitant ses sujets, elle paya la tournée et sortit devant ses compagnes étonnées.

— On va en boire un autre ! dit-elle.

— Et comment ! ripostèrent ensemble ses deux amies.

Cette fois, elles choisirent un café plus majestueux et