Page:Renee Dunan Une môme dessalée 1927.djvu/4

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 2 —

Le balai, jeté dans les jambes de l’enfant furieuse et riante, la fit trébucher fâcheusement. Elle ricocha sur le fauteuil avachi qui bordait la fenêtre, là où il est si doux d’épier les passants. Le fauteuil la renvoya sur le lit, car la pièce était étroite, se trouvant au septième d’une maison pauvre, en Ménilmontant. La mère de Zine put alors empoigner sa fille à plein corps et lui tenir la tête basse, puis, gaillardement elle releva la petite jupe effilochée et administra une solide fessée à la gaillarde braillante qui se tordait comme un ver.

Quand tout fut accompli, Mme Ursule Taupy se releva triomphante. Craignant toutefois une réaction de sa victime, elle se tint, ayant repris son balai, près de la porte, et très attentive aux événements. Car elle savait Zine méchante, rancunière et dépourvue de tout respect familial.

Mais la charmante fustigée semblait, pour la minute, ne pas songer à reprendre l’offensive. Elle abaissa, sur son aimable derrière rouge, une jupe trop courte et bien étroite. La figure enflammée, l’œil aigu, elle surveillait en même temps sa mère, et quelques larmes attardées, coulaient encore sur ses joues.

— Hein ! dit Mme Taupy, d’un air de triomphe, hein ! cette fois je t’ai eue ? Cela faisait trois ou quatre fois que tu échappais à la correction. Oui ! oui ! tu es plus agile que moi avec mon lumbago, mais je t’ai possédée tout de même, Zine, et je pense que tu ne recommenceras plus à me dire m… lorsque je te dirai poliment de me donner tes sous.

Bloquée et sentant qu’elle ne pourrait pas sortir ensuite en courant si elle répondait selon sa pensée, Zine grogna indistinctement.

Orgueilleuse, sa mère reprit :

— Ah ! ah ! ça t’a un peu matée, ce claque-fesses. Je le disais à ton pauvre père quand il vivait, une tournée, il n’y a rien de tel pour ces gosses qui se croient des femmes qui fument…

Zine continua de se taire, examinant les aîtres en atten-