LE FILANZANE
M. l’administrateur, en tournée depuis cinq jours dans la région la moins peuplée, la plus pauvre de son district, était las de la monotonie des étapes. Il servait depuis trois ans sur les hauts plateaux, il avait parcouru maintes fois les mornes étendues désertiques de cette partie du Betsileo. C’étaient des collines rougeâtres et stériles, couvertes d’une herbe rare et jaune, hérissées d’amoncellements de rocs de gneiss, pareils à des blocs erratiques ; dans les fonds, des rizières en étages, délaissées en cette saison, retenaient un peu d’eau marécageuse, où les déjections des bœufs mettaient des traînées de moires luisantes. Les tanety succédaient aux tanety, les rizières aux rizières. De loin en loin verdissait l’oasis d’une ferme isolée, enclose dans un fossé rond bordé de cactus. La large sente rouge, dans la bouzaka, montait et descendait, franchissait les digues étroites des rizières, escaladait les pentes arrondies des collines ; et c’était ainsi pendant des heures.