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Page:Renel - La Race inconnue, 1910.djvu/295

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les êtres frêles drapés dans des lambas et accroupis çà et là au seuil des portes ou au pied des tombeaux, tournaient à peine la tête pour le voir passer. Une fois il tira sur deux bœufs noirs qui traînaient une charrette au milieu du chemin ; les bœufs effrayés versèrent le char dans le fossé, et le Sénégalais poursuivit sa route sans même regarder derrière lui.

Comme le soleil s’inclinait vers les montagnes, Mohammed parvint, en haut d’une colline, à un village fortifié, construit jadis par les Houves. Les Fahavalou y avaient paru l’année de la grande insurrection, puis les Français, avec leurs canons qui tirent de loin, l’avaient bombardé et brûlé, par représailles ; les habitants, sans y rien comprendre, après avoir relevé tant bien que mal quelques cases, attendaient, hébétés, d’autres malheurs. Ce jour-là, l’oiseau de mauvais augure, le takatra au plumage sombre, avait voleté au-dessus du village en poussant son lugubre cri : aussi les vieillards, attachés aux croyances des ancêtres et mal impressionnés par ce signe, demeuraient inquiets.

Lorsque parut le grand soldat noir avec sa chechia rouge et son fusil, ce fut une fuite générale. Lui, las d’avoir tant marché, fit halte et regarda. Le village se tassait derrière un fossé à pic, taillé dans l’argile rouge ; le fond en était envahi par une luxuriante végétation de plantes de toutes sortes,