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Page:Renel - La Race inconnue, 1910.djvu/9

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Elle entra, fit glisser la porte le long des liens, et vint s’accroupir, muette, à sa place habituelle. Tous s’étaient tus, la contemplaient avec stupeur. Le repas était oublié. La plus petite sœur de Iasitera lui avait pris la main, et sanglotait éperdument. Il y eut de longs kabary. Le père alla chercher les Vieux. Ils racontèrent tout ce qu’ils savaient de l’Oiseau-d’Argent. Depuis des années aucune personne du village n’avait entendu son chant. La dernière qui était morte pour l’avoir écouté, était Rasahouly, femme de Rabehevitra, au temps où la première Ranavalouna régnait sur les Houves. Le vieux vivait encore, mais ne sortait plus guère de sa case. On le réveilla ; il conta, avec force détails puérils, comment sa femme, jadis, était morte, après que l’Oiseau, dans la forêt, lui eut chanté son chant.

Dans les jours qui suivirent, le village ne fut occupé que de l’événement. Dès que le soir approchait, les gens rentraient vite : personne n’osait plus s’attarder dans le bois ni sur les tavy. Iasitera, hantée par l’idée fixe de sa mort proche, restait étendue sur le rapaka, sans dormir, la tête couverte de son lamba ; ou bien elle errait de case en case. Lorsqu’elle entrait quelque part, on se taisait, on n’osait plus ni rire ni chanter en sa présence ; les enfants, dans la rue, se sauvaient en la voyant. Elle n’était plus ni la fille de ses parents,