Page:Renouvier - Les Dilemmes de la métaphysique pure, 1901.djvu/148

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du monde », est déjà contraire à l’optimisme finaliste. Straton, second successeur, dont les principes propres nous sont plus connus, n’admit plus qu’une nature aveugle et des causes mécaniques sans origine (XXIII). C’était le retour à la matière des atomistes, moins les atomes. Peut-être était-ce aussi la liberté, mais sur un fondement de hasard, non plus avec la nécessité comme chez Démocrite. En ce cas, le mode de constitution de la physique épicurienne avec Straton pour intermédiaire, ressortirait dans ses traits principaux : substitution du système atomistique à la physique aristotélicienne de la matière et de la forme, de la puissance et de l’acte ; remplacement de la loi de finalité, d’une part, et du déterminisme des tourbillons, de l’autre, par le hasard des rencontres d’atomes, soustraits par de petits écarts arbitraires à la rigoureuse causalité des lois mécaniques.

XLV

La liberté chez les épicuriens et chez les stoïciens. — Le clinamen atomique est un trait caractéristique de l’épicurisme. L’unique objet d’Épicure était de soustraire l’homme à toute solidarité pour lui assurer le bonheur à la condition de se diriger suivant certains préceptes dans la conduite de sa vie. L’hypothèse de l’ordre invariable de tous les phénomènes, réduisant à une illusion le pouvoir que l’homme s’attribue sur lui-même, fait une chimère de l’exercice que l’éthique lui demande de sa liberté. L’ordre divin de la Providence, autre chaîne, si l’on y croit, trouble l’âme par la crainte des dieux et par l’imagination du Tartare. Il fallait, pour se délivrer de toutes deux, reconnaître une