Page:Renouvier - Les Dilemmes de la métaphysique pure, 1901.djvu/171

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externe ; qu’ « il nous est impossible de nous former la plus légère idée de la qualité d’être cause », — pouvoir, agir, nécessiter, — « quand elle n’est pas prise pour la détermination de l’esprit à passer de l’idée d’un objet à l’idée de celui qui en est le compagnon ordinaire ». Attribuant cette détermination de l’esprit à l’association des idées et à l’habitude, qui nous font attendre un phénomène en accompagnement ou à la suite d’un autre que nous avons toujours observé dans cette liaison, Hume refusait toute valeur logique à ce jugement, que Kant devait appeler synthétique a priori (L), par lequel nous joignons à l’idée d’un commencement l’idée d’une cause. Comment le philosophe qui plaçait ainsi dans l’observation l’origine, non de l’idée formelle de cause, mais d’une certaine attente pour en tenir lieu, a-t-il pu être, lui, empiriste pur, et sceptique, il prétendait l’être, un partisan qu’on peut bien dire dogmatique de la doctrine de la nécessité, c’est ce qu’il faut expliquer.

Si Hume n’avait voulu que s’attaquer à l’idée générale de cause, il le pouvait, et ouvrir par là de grandes questions sur la nature de la cause dans les phénomènes physiques ; mais il y a quelque chose de plus fort et que l’idée générale, et que les associations d’idées formées par l’expérience : c’est la conscience immédiate de l’activité, inséparable du sentiment de la vie, d’où l’idée d’un pouvoir, empiriquement vérifié dès la production des plus simples mouvements volontaires. Cette conscience ne dépend pas de la notion de cause, envisagée dans la puissance des phénomènes naturels ; celle-ci dépend d’elle, au contraire, et naît de son extension aux rapports de ces phénomènes successifs. Or c’est la cause mentale que Hume niait réellement, en