Page:Renouvier - Les Dilemmes de la métaphysique pure, 1901.djvu/97

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celle du moi d’autrui, par induction. Il définissait par la volonté et l’entendement réunis la notion d’esprit en son sens le plus rigoureux, et Dieu comme l’esprit parfait, connaissant toutes choses, et cause, par son action volontaire, de la perception que nous avons des idées. Cet esprit universel lui était démontré par la notion d’activité et de volonté opposée à la passivité des idées. C’est la notion de cause qui, par voie de généralisation, lui démontrait Dieu comme auteur des idées et créateur.

Cette doctrine s’écarte peu de la pensée de Descartes, et Berkeley dérogeait à ses propres thèses touchant les idées générales. L’idée générale de l’étendue, telle que Descartes, mathématicien, la comprenait, ne se prête ni plus ni moins au substantialisme que la construction intellectuelle de l’esprit par Berkeley. Au reste, la notion de substance devait rester très embarrassante pour l’école empiriste : il y avait illogicité, si, en abandonnant le réalisme pour constituer le sujet externe des qualités sensibles, on le gardait pour donner un sujet aux qualités ou fonctions intellectuelles ; et il y avait impuissance, si on ne découvrait pas une conception capable de remplacer celle de la substance pour l’explication de l’identité personnelle. C’est un office qui ne peut être demande qu’à des notions étrangères aux penseurs de l’école empiriste.

David Hume eut la vue claire de la difficulté, dès qu’il eut pris le parti de rejeter entièrement la substance, et crut l’analyse psychologique vouée à une conclusion sceptique. Déjà Locke avait remarqué que « le mot de substance n’emporte autre chose à notre égard qu’un certain sujet indéterminé que nous ne connaissons point, c’est-à-dire quelque chose dont nous n’avons aucune idée particulière, distincte et positive, mais que