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LES ÉPOUSES PAR QUARTIER

-Antoine, chez sa femme la jolie balancière. Tout était coi dans la maison. Il frappa. — M. Oui ? — Il est absent. Madame ? Elle soupe en ville. — L’affaire est pressée il faut absolument que je la voie ce soir. — Où voulez-vous que je la trouve ? elle est sortie en fiacre, comme elle fait presque tous les soirs, et je ne sais à quelle heure elle reviendra. — N’y a-t-il pas une femme de chambre, quelqu’un en un mot, qui soit plus instruit que vous ? La femme de chambre suit madame, qui a besoin d’elle, pour la déshabiller et la rhabiller, quand elle couche en ville. — Quand elle couche en ville. — Oui, sans doute, une ou deux fois par semaine ; et c’est aujourd’hui un des jours ; ainsi, vous ne sauriez la voir. Mais laissez votre adresse ou écrivez un mot que vous cachèterez ; madame le lira dès qu’elle sera de retour, et elle ira chez vous sur-le champ. — Elle ira chez un jeune homme ? — Oui ! Voilà tout ce que je puis pour votre service.

M. Oui, aussi jaloux que M. de Saintornant, fut obligé de s’en retourner comme il était venu.

Tandis qu’il tenait le fiacre, M. Eustache Dubois le fit aller au faubourg Saint-Honoré. Il y arriva aux environs de minuit. C’était chez sa dernière femme, qui le croyait en campagne pour ses manufactures de lames, et qu’il n’avait quittée que depuis huit jours. Il renvoya son fiacre, et ne frappa point : mais il se glissa par le jardin, au moyen d’une clef qu’il avait. sur lui, et vint au pied des fenêtres de la chambre de sa femme, où il y avait encore de la lumière. Il entendit rire, chanter, se divertir. Il ouvrit avec sa clef une porte d’escalier dérobé qui conduisait chez madame : il monta doucement, et parvint à mettre le nez à une porte entr’ouverte. Il vit la jolie gaînière avec sa famille, qui se divertissait, ou plutôt, qui achevait de se divertir. Le gaînier et la femme étaient ivres ; les autres personnes de sa compagnie à peu près de même, à l’exception d’un jeune faraud, qui faisait les yeux doux à madame Eustache Dubois. Tout le monde sortit ; le jeune faraud aida au père et