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D'UN HOMME DE QUARANTE-CINQ ANS

Aussi nos Bergers, dans leur hommage,
N’ont point le langage
Des trompeurs Amants ;
Leur talent est de peindre à nos âmes
Les plus vives flammes
Par les sentiments

Nous bannissons les tristes alarmes,
Aux tourments notre cœur est fermé ;
Si notre Berger répand des larmes,
C’est du plaisir de se voir aimé :
Plus il est sûr de notre tendresse,
Et plus il s’empresse
De la mériter :
Ce feu délicat qui nous anime.
Nourri par l’estime.
Ne fait qu’augmenter.

Aux douceurs d’une juste espérance.
Un Berger constant doit se livrer ;
L’instant vient où notre résistance,
Dans les vrais plaisirs doit expirer ;
Mais l’amant à qui l’on rend les armes,
De vives alarmes
Doit nous préserver.
Et plus constant après sa victoire,
Il trouve sa gloire
À la conserver.


« Voilà une douce morale ! lui dis-je. — C’est celle de la nature. — Vous avez de l’esprit et de la philosophie ! — J’ai vu un peu de monde, je vous conterai cela quelque jour ; j’ai passé quelquefois huit jours dans une jolie maison de campagne, chez un magistrat de cour souveraine, où il venait du beau monde. Vous savez d’ailleurs que j’ai été au couvent… J’ai été tentée de faire une pièce. — Une pièce ! Il faut connaître le théâtre ! — J’ai été très souvent au spectacle et c’est ce qui m’a formée ; j’y aurais été plus souvent, mais maman s’ennuie aux bons spectacles ; elle n’aime que Nicolet[1].Audinot est même

  1. Le Théâtre de Nicolet ou des Grands Danseurs du Roi, sur le boulevard