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LA DERNIÈRE AVENTURE

sion, il désira vivement une seconde entrevue. Parlis la lui procura aisément : l’âme déchirée par le sacrifice qu’il faisait à l’intérêt de la jeune amie, il se portait avec une inconcevable ardeur à ce qui devait la séparer de lui pour jamais. Non content d’avoir enflammé l’imagination de M. de Blémont, il avait parlé de lui à la jeune Élise, avant la seconde entrevue : il le lui avait peint comme un homme qui ne désirait de la toucher et de s’unir à elle, que pour être le protecteur de sa jeunesse, pour la préserver de tous les périls auxquels une jolie personne dont la fortune est médiocre, peut être exposée à Paris. Élise écouta Parlis comme un père ; l’éloge qu’il faisait de son ami, lui parut d’autant plus vrai, qu’il en disait ce qu’il était lui-même, et ce qu’il aurait été, s’il avait eu plus de fortune et de santé. Elle promit de recevoir M. de Blémont avec les égards qu’il méritait. Il vint enfin.

Suivant que cet ami de Parlis avait paru le désirer, ce dernier avait engagé la mère et la fille à faire une partie de promenade. M. de Blémont arriva comme on allait partir ; on l’en mit tout naturellement. Parlis, qui voulait le favoriser, s’empara de la mère d’Élise, et comme la dame était prévenue en gros, que la jeune personne était parfaitement instruite, M. de Blémont lui donna la main lorsqu’on fut descendu de voiture ; et il eut avec elle un long entretien. Élise, favorablement prévenue, prit avec lui un air de confiance, parce qu’elle en ressentait. Elle lui donna le bras, quand il parut le désirer ; ils causèrent. Parlis sentit alors au fond de son cœur les mouvements les plus douloureux ; mais il sut charmer son ennui, par une conversation animée avec la mère d’Élise. Pour s’occuper, distraire l’attention de cette dame, et laisser à M. de Blémont tout le temps de sonder le cœur de celle qu’il voulait connaitre, car il avait fort insisté, vu son âge, sur la nécessité d’être convaincu qu’Élise n’aurait pas de répugnance pour lui ; et en cela, il paraissait fort sage. Parlis tâchait d’être amusant, et il l’était. Cependant Élise s’arrêtait souvent, pour attendre sa mère ; plus souvent elle se retournait en souriant du côté de Parlis, qui en conclut qu’elle