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LA DERNIÈRE AVENTURE

est bien vague ! — Je le trouve très précis et je n’ai rien à y ajouter. — Ainsi, vous allez épouser Parlis. — C’est ma plus chère espérance. — Il n’est pas riche. — Tant pis pour lui, mais non pour moi ; je l’aime pauvre, je l’estime, je m’honorerai de lui appartenir. Il ne m’a point avilie, il m’a toujours marqué une considération flatteuse ; il n’a pas exigé des sentiments que je lui donne volontiers. — Il est heureux ! — Oui, si son bonheur dépend de ma tendresse, il est le plus heureux des hommes. — Il a votre tendresse ? — Il a tous les sentiments flatteurs dont mon cœur soit susceptible. — Son âge n’y fait rien ? — Rien absolument. — Est-ce sa figure, sa personne, ou son mérite qui vous ont attachée ? — Ses procédés, son caractère, les sentiments obligeants, voilà ce qui lui donne mon cœur. — Cependant vous auriez consenti à vous donner à moi ? — Je croyais que vous lui ressembliez. — Vous m’auriez aimé ? — Certainement, avec les mêmes dispositions à mon égard, qu’a montrées M. Parlis. — Je m’y suis bien mal pris ? — Lisez votre lettre, elle répond à tout. — Je m’y suis pris avec vous, mademoiselle, comme doit faire tout homme qui connaît le monde et les femmes. — Si c’est là ce que produit dans vos pareils la connaissance du monde et des femmes, c’est un triste avantage ! car il n’est propre qu’à vous faire détester. — Vous n’avez apparemment pas le cœur fait comme les autres ? — Je crois que si, mais je vous crois beaucoup d’orgueil ; vous avez dédaigné un moyen suggéré par M. Parlis. Je ne crois pas que vous ayiez jamais connu de femme honnête, du moins comme inclination, votre conduite semble le prouver ; ou si par hasard, vous en avez connues, elles vous ont fort maltraité ! Vous devez en être très mécontent ! C’est pourquoi vous les craignez, vous paraissez, en abordant une femme pour la première fois, vouloir vous assurer qu’elle n’est pas de celles que vous appelez de froides bégueules, et pour cela vous tenez un langage impardonnable. Je souhaite que vous vous corrigiez de cette manie, mais je ne suis plus intéressée à votre changement que pour vous. — C’est être généreuse ! … Mais vous m’auriez aimé, agissant à la Parlis ? — Oui,