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tapis sous les arcades, les clients parisiens, provinciaux ou étrangers, qu’ils écorchent très consciencieusement. Ils en ont la réputation et ils la méritent. Au Palais-Royal tout vaut deux fois plus cher qu’ailleurs.

Il y a là des spécialistes qui sont en leur genre de grands artistes, celui entre autres qui a inventé pour hommes et pour femmes des redingotes en taffetas gommé contre les averses, des redingotes qu’on peut mettre dans un fourreau comme un parapluie.

La plupart des boutiques se distinguent par leur luxe, par la richesse et le goût de leurs étalages, mais deux plus particulièrement, où l’on vend de fines porcelaines et de délicieux bijoux, le magasin de Poix-Menu et le Grand-Dunkerque. Les filles du Palais-Royal en connaissent le chemin.

Non moins achalandés sont ces petits industriels qui se contentent d’installations sommaires. La Belle Lyonnaise qui débite sous les galeries de bois des boudins et des saucissons de Bologne — pourquoi pas de Lyon ? — Le marchand de gaufres, qui, tout enfariné, a l’air d’un Pierrot boutiquier, et la Bouquetière de Mme la Duchesse d’Orléans, installée en face du restaurant de La Grotte Flamande, et qui a seule le droit de vendre des fleurs dans le jardin. Elle en profite naturellement pour majorer ses prix, et le moindre petit bouquet, à peine présentable à une fiancée et dont une maîtresse ne voudrait pas, coûte six livres.

Le plus célèbre de tous ces petits industriels rapaces et roublards, c’est Benoît qui s’honore du titre magnifique de Marronnier de S. A. S. le duc d’Orléans. Il a trouvé le moyen d’attirer le public en habillant ses deux garçons en capucins. Il vend ses marrons rôtis vingt-quatre sous le cent.

Parmi ceux qui n’ont pas de boutiques et déambulent dans le jardin en attendant la clientèle, bornons-nous à mentionner les marchands de chiens, qui font surtout commerce de chiens volés, et traînent par une corde de malheureux carlins ou épagneuls,