Page:Restif de la Bretonne - Mes inscripcions, éd. Cottin, 1889.djvu/105

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à fait malheureux, puisque je connais deux obligées qui ne sont pas ingrates[1]. »

Agnès Lebègue elle-même a rendu hommage à la générosité de son mari, dans une lettre écrite après la mort de Restif[2]. Elle confirme ce qu’il dit dans Monsieur Nicolas[3], que, pendant quinze ans, treize pères de famille lui ont dû la subsistance. Elle ajoute que les pauvres avaient beaucoup perdu en le perdant : « Ne faut-il pas convenir, dit Grimm, en lisant ce détail dans la Paysanne pervertie, que c’est là, véritablement, l’existence d’un citoyen utile, estimable, honorable ? »

Tout était singulier chez cet homme : fort mal soigné de sa personne, il confesse n’avoir point acheté d’habits, de 1773 à 1796[4]. Cubières raconte qu’il poussait la négligence jusqu’à la malpropreté ; que l’ayant, un jour, rencontré avec sa barbe inculte, il lui demanda quand il comptait s’en séparer : « Elle ne tombera, répondit-il, que lorsque j’aurai achevé le roman auquel je travaille. » Ce roman était en quinze volumes, et trois seulement étaient faits. Mais Restif, dit Cubières, en composait un demi par jour. Notre volume prouvera qu’il y a, ici, exagération.

Il sortait vêtu du grand manteau à collet, coiffé du chapeau de feutre à larges bords

  1. V. Mes Inscriptions, p. 79.
  2. V. la préface de la notice placée en tête de l’Histoire des compagnes de Maria.
  3. T. XI, p. 211.
  4. Monsieur Nicolas, t. X, p. 248.