quatre ans, il remarquait déjà le pied d’Agathe
Tilhien, paysanne de Sacy[1]. Plus tard, la vue
de la jambe de Marguerite Pâris, servante de
son frère l’abbé Thomas, l’amenait à de
graves excès. Il voulait qu’on mît dans son
tombeau la mule de madame Parangon,
essayée par Zéphyre. (Double consécration ! la
mule avait porté « deux chefs-d’œuvre ! ») Le
premier de ces chefs-d’œuvre l’avait fait succomber, le jour où son œil s’était fixé « sur
la jambe fine de madame Parangon, sur son
soulier de droguet blanc, dont le talon mince,
élevé, donnait encore plus de délicatesse à son
pied mignon, le mieux fait qu’il eût vu de sa
vie ». Le second servait de modèle à ses graveurs. Bastienne Dumoulin, seule, avait pu
mettre cette chaussure. Aussi se plaisait-il à l’en fournir.
Il prend note, dans Mes Inscriptions, du jour
où il a essayé les souliers à « haut talon » à
madame Belin[2] femme du libraire, et du
soir où sa fille Marianne, chaussée de « souliers noirs à hauts talons[3] », lui a lu la Prévention nationale. Il avait remarqué que les jolis pieds
donnaient de l’élégance aux animaux mêmes
et cherchait à se rendre compte de son goût
si prononcé, en se demandant s’il avait sa
cause « dans le physique ou dans le moral[4] ».
Il décidait la question ainsi : « La passion
que j’eus, dès l’enfance, pour les chaussures
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