Page:Restif de la Bretonne - Monsieur Nicolas, t. 1, 1883.djvu/160

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l’espoir d’y avoir des assistants. Je poussai moi-même un cri qui me fit reconnaître. Et aussitôt j’aperçus Étienne Dumont, Edme Droin, Laurent Tilhien, Marie Fouard, Madeleine Piôt et quelques autres filles et garçons de mon âge, qui gardaient soit leurs brebis, soit les bœufs et les vaches de trait. Je poussai un second cri auquel ils répondirent. — « Venez, venez par ici ! » criai-je, « dans une bonne vaux ! » (expression du pays, qui signifie un endroit abondant en quelque chose que ce soit) ; « il y a de la belle herbe ! il y a des poires de miel ! » À ce mot décisif toute la troupe toucha vers moi. Je fis les honneurs de mon vallon qui les ravit moins que moi ; mais ils le trouvèrent agréable. Pour moi, en y voyant Marie Fouard et Madeleine Piôt, je le trouvai plus féerique encore. J’exposai mes droits de propriétaire à la troupe, en montrant ma pyramide et son autel : ces titres étaient sacrés ; mes droits furent reconnus pour inviolables par mes camarades. Je les invitai ensuite à mon sacrifice, dont les victimes les émerveillèrent. Tout étant prêt je commençaiSacrifices. l’acte. J’arrangeai le bois en bûcher, et quand le feu fut très vif, j’y jetai les entrailles de l’oiseau que j’avais préparées, car j’avais entendu dire que les prêtres Juifs jetaient ainsi dans le feu les entrailles de leurs victimes. Je mis ensuite le corps sur mon autel, et je voyais avec des élans de dévotion tourbillonner la fumée de mon sacrifice que j’accompagnais de quelques versets de psaumes. J’étais debout très grave et réellement pénétré de la grandeur de