Page:Restif de la Bretonne - Monsieur Nicolas, t. 1, 1883.djvu/168

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me servaient de lutrin, pour chanter les versets sur le ton des Épîtres. Margot m’écoutait. Je la défiai de lire une page en Français, aussi bien que je lisais le Latin. Elle ne sentit pas la ruse, et lut tout haut. Je la suivais des yeux, et mon excellente mémoire me fit tout retenir mot pour mot. Dés que ma sœur aînée de sept ans se fut éloignée, je repris la page, et la déchiffrai, non sans admiration. Je trouvai ensuite moyen de mettre la main sur la Bible de mon père, dont je savais par cœur tout l’historique, que je lus couramment. Ainsi, je savais lire le Français à l’époque où nous en sommes. Mais l’article de mes amusements n’est pas épuisé.

Je trouvai, au commencement de mon psautier, un Ordinaire de la messe, aussi Latin-Français. Un dimanche, que Jacquot était resté avec nous, parce que deux des enfants étaient malades, je dis que j’allais faire le curé. Jacquot s’offrit pour répondre. Je mis ma chemise blanche par-dessus mes habits : une table fut l’autel : toutes les cérémonies, que nous savions par cœur, furent observées. Les enfants étaient transportés de joie, quand je les fis aller à l’offerte, et communier ensuite avec du pain salé, taillé en tranches minces et rondes : il y eut seulement de la dispute pour la grosseur de leur communion. À dîner, ces enflmts dirent qu’ils avaient été à la messe, que je leur avais dite, et qu’ils y avaient tous fait leurs dévotions. Aussi étaient-ils sages et modestes. On y faisait peu d’attention. Ce fut la sœur aînée, Madeleine, qui se fit