Page:Retif de La Bretonne - L’Anti-Justine, 1798.djvu/54

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Elle était aux anges, quand j’entendis Vitnègre revenir. Je crus qu’il amenait le moine. Il entra, passa rapidement, suivi de trois voisines, auxquelles il disait : « Je vas vous montrer ça ! » Effectivement, il leur montra quelque chose dans sa chambre.

Cependant, mon amoureuse fille, gamahuchée par un amant aimé, fit un profond soupir. Les trois voisines prêtèrent l’oreille. « Ce n’est rien, dit Vitnègre ; ma femme est rentrée et je ne le savais pas. C’est pour elle cette étoffe-là. » — Oh ! il faut la lui montrer, s’écrièrent les trois voisines. Le monstre retint celle qui allait la chercher. Il prit la lumière, en disant : « Je vais auparavant voir si elle ne dort pas. » Il ne fut qu’à la porte, où il s’arrêta d’un air de surprise et d’horreur ! Il recula. Mais les trois voisines avaient vu comme lui, par-dessus son épaule. Conquette troussée, étendue à la renverse sur le pied du lit, la tête d’un homme entre ses cuisses. Il les fit sortir par le corridor, en se frappant le front.

Il avait rempli son but. Si sa femme criait pendant la nuit, les trois voisines, qui se croyaient bien au fait, y mettraient les autres. Si Mme Vitnègre périssait écalventrée par le timon du moine (qui, étant extrêmement riche, devait la payer soixante mille francs, et qui en avait déjà tué plusieurs, choisissant toujours les plus étroites), ce serait la morte qui aurait tort.

Cependant Vitnègre rentrait auprès des deux amants, qui avaient changé de position. Lenfonceur, après avoir déchargé