Page:Retté - Le Symbolisme. Anecdotes et souvenirs.djvu/171

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pour qui la psychologie n’était qu’un jeu de l’instinct, devait succéder un art de rêve, tout en délicatesses et en nuances. Les esprits saturés de naturalisme sentaient naître un besoin d’idéal. La vie ne leur apparaissait plus comme une banale succession de faits divers mais comme un plan magique et ordonné où chaque fleur inscrit un symbole. Le sens du mystère s’éveillait dans les âmes. On sentait, en un mot, le besoin d’autre chose, sans savoir encore de quoi cet autre chose serait fait. Ces tendances nouvelles s’étaient déjà manifestées à deux ou trois reprises sans avoir pu se formuler d’une façon bien définie. »

M. Raynaud énumère ensuite les petites revues éphémères où les novateurs s’essayaient vers leur vingtième année, puis il continue : « À ce moment parut La Plume. D’un format léger et d’un prix modique, elle fut éclectique...[1] Elle fut comme le trait-d’union de toutes ces feuilles d’avant-garde dispersées. Elle fut cela, et plus que cela, car non contente de s’occuper de littérature, elle s’intéressa à tous les arts ; elle or-



  1. On ne saurait trop le redire, en effet. Nous qu’on accusait de nous enclore en des chapelles fermées, nous accueillions ceux-là même qui nous combattaient. Malheureusement, ni leurs vers ni leur prose ne tenaient contre l’art nouveau. C’est que, la chose est incontestable, tous les poètes de talent venaient au symbolisme. — Nous ne pouvions pas faire, malgré notre courtoisie, que les enfants de la vieillesse du Parnasse enfourchassent notre fougueux Pégase.