Page:Retté - Le Symbolisme. Anecdotes et souvenirs.djvu/179

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condescendance jusqu’à me présenter à MM. Stuart Merrill, qui me parla d’étoffes japonaises ; — Jean Moréas, qui me vanta les clovisses de la Méditerranée ; — Gaston Dubreuilh, musicien, qui flétrit violemment la mode des chapeaux à bords plats ; — Hugues Rebell, qui me décrivit Hyde-Park, que je crois pourtant connaître mieux que lui ; — Frédéric Corbier, mathématicien silencieux, qui, de tout le dîner, n’émit que cet aphorisme : « Vive la joie et ses filles ! » et de quel ton lugubre. Enfin, M. Retté lui-même raconta la bataille de Cannes à M. Dubreuilh, et se permit une foule de calembours et de jeux de mots du plus mauvais goût. De littérature, d’art, pas un mot. Seul, le gentleman qui nous servait émit quelques opinions lettrées, mais on l’écoutait peu. Pourtant j’appris de lui que La Plume était une revue littéraire, artistique et sociale, où ces messieurs daignaient se manifester quelquefois par des poèmes nécessairement sublimes et des articles pointus à l’égard d’autrui, élogieux à l’égard les uns des autres, mais souvent aussi pointus qu’élogieux. Cette définition me laissa perplexe, rapprochée de celle de M. Retté. Le boy ajouta obligeamment que tous les samedis, La Plume tenait des réunions dans un vaste palais souterrain situé au bas du boulevard Saint-Michel. « On y présente en liberté des poètes et des chansonniers », me dit-il tout bas avec un clin d’œil facétieux.

J’avisai M. Retté que j’étais fixé sur La Plume et que