Page:Retté - Réflexions sur l’anarchie. Promenades subversives.djvu/28

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
− 27 −

sur des banquettes de café et le jeu. Chez les soldats : l’ennui profond, la conscience de faire une besogne inutile — l’un et l’autre journellement exprimés par des phrases lugubres d’exaspération — l’impatience fébrile de se voir libérés. Pour distractions : des soûleries furieuses et des coups distribués aux civils tenus pour des inférieurs bons à exploiter et à tarabuster. Cela fort encouragé par maints officiers comme susceptible de développer l’esprit militaire. Toute occupation intellectuelle tenue en mépris. De celui qui lisait, l’on disait : « Tiens, Untel est en train de s’abrutir ! » — Ce régiment n’était ni pire ni meilleur que tous les autres. Quiconque a passé par l’armée dira que je n’exagère rien.

Il y a d’honnêtes citoyens, bons pères et bons époux qui trouvent tout naturel qu’on apprenne à leurs enfants l’art d’assassiner autrui. Quand ils voient piétiner autour de la loque tricolore quelques bestiaux à massacre, leur poitrine se gonfle d’une « noble émotion patriotique » — et les Coppée sentent « se hérisser le bonnet à poils qu’ils ont dans le cœur. »

En somme, le militarisme sert à former des individus brutaux, féroces, lubriques, ivrognes, ignorants et paresseux.

Les Bourgeois vantent volontiers la prospérité de notre état social. Cette prospérité est tellement évidente qu’en France seulement il y a 500.000 vagabonds (statistiques officielles) sans compter ceux qu’on ne connaît pas. Chaque année, 90.000 personnes meurent de faim — à la lettre