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D I A L O G V EI I.

nel, & faiſoyent aller en fumee tout iugement & condemnation. Dont il aduenoit que le condamné au lieu de s’amender alloit multipliant ſes fautes, cuidant que tout luy fuſ‍t permis ſous couleur qu’on le penſoit eſ‍tre braue, gaillard & bien adroit ſoldat.
L’hi. Cela eſ‍t bien fort dangereux : il n’y a celuy qui ne condamne le fait des Romains en ſemblable cas, quand pour les merites d’Horace, qui par ſa vaillance auoit vaincu les Curiaces, & rendu par ce moyen là Rome maiſ‍treſ‍ſe des Albains, ils luy remirent la fratricide qu’il auoit commis enuers ſa ſœur, laquelle il meurtrit au retour de ſa vic‍toire, pour le regret qu’elle portoit d’y auoir perdu ſon mary. Au lieu qu’Horace deuoit eſ‍tre chaſ‍tié par ſupplice de mort, cõme il le meritoit tresbien.
Il vaut beaucoup mieux pratiquer ce que les Romains plus auiſez firent par apres enuers leurs citoyens & ſoldats en remunerant les bienfaits & bons ſeruices de quelque honneſ‍te petit guerdon ſelon la portee de la republique & diſpenſation du temps : & en chaſ‍tiant rudement les vices & les laſchetez, cõme ils firent enuers Manlius Capitolinus. Auquel pour auoir ſauué le Capitole, comme ie te diſois n’agueres, ils donnerent vne petite meſure de farine (preſent aſ‍ſez conuenable pour ce temps là) en recognoiſ‍ſance de ſa vertu, & ne laiſ‍ſerent pas pourtant de le condamner & ietter apres du haut en bas du meſme Capitole qu’il auoit peu deuant gardé, à cauſe de la ſeditiõ qu’il auoit cuidé faire naiſ‍tre dedans Rome par