Page:Revoil - Les Exiles.djvu/199

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deux nous vivions presque dans l’ignorance des angoisses de la pauvreté ; quand vous étiez enfant, on vous avait dérobé le spectacle de ces affreuses souffrances, comme vous-même vous me l’aviez caché, ma mère. Mais maintenant je sais tout : hier, à cette fête, tandis qu’on dansait autour de moi, j’étais tombée dans une rêverie profonde. Ces beaux salons resplendissants de lumière et de fleurs, ces femmes couvertes des plus riches parures ; ce buffet surchargé de vaisselle d’argent, de rafraîchissements et de mets exquis, me faisaient penser involontairement aux mansardes sombres et glacées où des femmes et des enfants couverts de haillons attendent, souvent en vain, de la charité du riche, quelques aliments grossiers pour apaiser leur faim. Hélas ! ma mère, ce douloureux tableau je l’avais plutôt deviné qu’entrevu lorsque l’hiver, après une agréable promenade au Jardin-des-