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AU PAYS DES KANGAROUS

« L’animal que vous appelez wombat, dit Max Mayburn est celui que les naturalistes nomment le phascolomis ursinus, dont la forme est celle d’un ours et d’un cochon, et qui appartient à la famille des marsupiaux.

— J’avoue que la bête est assez laide : un corps énorme sur de petites pattes ; mais la fourrure est superbe. Nous essayerons de la tanner, afin d’en faire un matelas pour mon père, dit Hugues. Après tout, Jenny, préparez-nous des grillades de wombat ; ce sera meilleur que ces galettes desséchées. Nous devons prendre des forces pour aller en avant et sortir de ce désert. »

En effet, les steaks de phascolome étaient excellents et furent trouvés tels par toute la petite troupe : le jus des melons suppléa autant que possible à l’eau, et quand le repas eut été achevé, les jeunes gens s’en allèrent à la recherche du précieux liquide, tandis que la caravane avançait dans la direction convenue. Le pays que l’on parcourait était sablonneux, et les seuls arbustes qui y poussaient ressemblaient à la bruyère des montagnes de l’Écosse. La traction du traîneau sur ces racines fleuries devenait fort difficile, et, qui plus est, Max Mayburn souffrait tellement de la soif, qu’il devint indispensable de le soutenir pour qu’il pût avancer.

« Bon courage, Monsieur, lui disait Wilkins. Et vous, mistress Jenny, préparez vos seaux et vos récipients ; nous aurons de la pluie avant peu ! Voyons, messieurs, tâchons de découvrir un abri pour que nous puissions nous y mettre à couvert. »

En effet, le ciel s’était obscurci, et des éclats de tonnerre grondaient à l’horizon. Mais les jeunes gens n’apercevaient pas trace d’arbre autour d’eux ; il leur fallut se contenter d’un buisson de plante à thé accroché le long d’une colline. Ils creusèrent en avant une sorte de niche, au-dessus de laquelle ils étendirent la peau du wombat pour abriter Marguerite et son père.

À peine ce travail était-il terminé, que la pluie tomba par torrents, et l’on eut bien vite rempli les vaisseaux destinés à contenir le liquide bienfaisant.

Pendant ce temps-là, les jeunes gens se creusaient des gîtes pour échapper à l’averse continue, ce qui n’empêchait pas que, de temps à autre, chacun tendît la main pour la remplir et se désaltérer. Quoique le liquide fût chaud, tous déclaraient que c’était chose excellente que de boire à sa soif.

La faim se fit bientôt sentir, et l’on eût bien désiré croquer un steak de wombat ; mais comment faire du feu ? on ne pouvait y songer.

Enfin le jour se leva, et l’on se disposait à allumer un brasier dans l’intérieur d’une niche creusée à cet usage, quand les oreilles des voyageurs furent frappées d’un bruit de pas précipités qui approchait à chaque instant, et bientôt ils entendirent des voix s’exprimant dans un langage inconnu.

« Les sauvages ! les sauvages murmura Hugues. Il me semble entendre Black Peter.

— Écartez ce buisson, et mettez en sûreté les seaux et récipients à eau. Marguerite, mon père, cachez-vous sous les fourrures, que l’on ne vous voie pas ! Et vous, mes amis, abritez-vous où vous pourrez. Pas un mot ! »