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12 ; Les Noces de Jeannette, 3 ; Myosotis, 8 ; Werther, 6 ; Le Crépuscule des Dieux, 13 ; Manon, 5 ; Cavalleria Rusticana, 4 ; Le Légataire Universel, 3 ; La Walkyrie, 5 ; Le Caïd, 4 ; Javotte, 3 ; Samson et Dalila, 6 ; les Dragons de Villards, 2 ; l’Or du Rhin, 2 ; Siegfried, 2.

Il faut tout d’abord remarquer une chose importante que n’indique pas ce tableau ; c’est l’abus des Relâches. Notre confrère Sapin, du Salut Public, l’homme le plus documenté de notre ville sur tout ce qui concerne le théâtre, a compté qu’il s’en était produit 58, soit, sur six mois de saison, deux mois entiers de repos. Ces relâches étaient du reste pleinement justifiés, je l’avoue, parce que le public désertait le théâtre et surtout parce que notre scène n’avait pas de répertoire faute d’artiste pour le chanter et que les œuvres représentées étaient en général interprétées dans des conditions tout-à-fait détestables.

Je n’ai pourtant pas la prétention de tout condamner en bloc dans la saison dernière. Mettant à part la Tétralogie dont j’ai dit précédemment les qualités et les défauts, je reconnais volontiers que les représentations de Salammbô et du Crépuscule ont été très bonnes, que d’autres, Lohengrin[1] et Tanhæuser furent très satisfaisantes dans l’ensemble, enfin que Mesdames du corps de ballet, très bien stylées par M. Soyer de Tondeur, dansèrent toujours les divertissement chorégraphiques de la plus agréable façon. Mais dans l’ensemble, quelle piteuse saison ! Chose invraisemblable : en dehors de Faust, pas un opéra du répertoire ne fut représenté ; les Huguenots eux mêmes, pour la première fois depuis leur création, c’est à dire depuis 66 ans (1838), ne parurent pas une fois sur l’affiche, et pour remplacer, beaucoup d’opéras-comiques malheureusement interprétés par une troupe dont les chefs d’emploi étaient des plus médiocres.

Et pourtant, avec les seuls éléments dont on disposait cet hiver, il eût été possible, avec une bonne organisation, de donner un ensemble de représentations sinon brillant, du moins très honorable et si la saison a été mauvaise, c’est uniquement faute d’une direction intelligente et éclairée.

Comment les choses se sont-elles passées au théâtre ? Le principe directeur de la saison semble avoir été celui-ci : « Les artistes ne sont pas faits pour le répertoire, mais le répertoire est fait pour les artistes. » Or, Mme Davray, première chanteuse légère, par exemple, désirant vivementt se montrer dans tous les rôles de son répertoire, la direction s’empressait de reprendre ou de créer des œuvres sans valeur et sans attrait pour le public, telles que le Caïd et la Bohême de Leoncavallo. Mme Charles Mazarin voulant faire valoir ses qualités dramatiques dans une œuvre tout extérieure et d’effets faciles, on reprenait Cavalleria rusticana malgré la pauvreté de l’œuvre de Mascagni et en dépit du remarquable insuccès de tout le répertoire italien (Traviata, Barbier de Séville, Bohême, etc.). Mais il fallait un ténor pour chanter ces œuvres et, comme M. Boulo, ténor léger, titulaire de l’emploi, avait été, dès les premiers jours, exécuté par la Presse et ne devait pas reparaître à une première, on’était obligé de s’adresser à M. Gautier dont les qualités ne convenaient guère à l’opéra-comique. Et ainsi, M. Gautier pris par l’opéra-comique et M. Verdier par Salammbô et le Crépuscule[2], il n’y avait plus de ténor pour

  1. Lohengrin fut remarquable avec Mlle Janssen et M. Verdier et simplement quelconque avec Mlle Claessen et M. Gautier.
  2. L’administration s’était formellement interdit de donner aux principaux artistes des cachets supplémentaires ; on peut remarquer, par exemple, en consultant le tableau des représentations donné ci-dessus, que M. Verdier a chanté exactement quarante-huit fois, soit huit fois par mois. Et la direction, une fois données les huit représentations mensuelles de M. Verdier, préférait faire relâche plutôt que donner au ténor un cachet supplémentaire de 600 ou 700 francs, moyennant quoi