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Page:Revue belge de philologie et d’histoire, Tome 1.djvu/85

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de ce temps. On aboutirait ainsi à des conséquences proprement absurdes.

Il est au surplus une raison d’un autre ordre que celui des événements politiques qui justifie le choix de 395 et de 1492, une raison meilleure peut-être que les autres aux yeux des historiens, toujours disposés à discuter de l’importance relative des faits qu’ils étudient. Le moyen âge ne doit pas seulement l’originalité de sa physionomie à certaines institutions, à certaines croyances, à certaines formes artistiques et littéraires ; il la doit aussi à ce fait que les sources de son histoire ont un caractère particulier, qu’elles exigent, pour être utilement employées, des études déterminées. Pour décrire l’antiquité, les érudits se servent des inscriptions, des papyrus, des monuments, des œuvres littéraires ; et ils doivent au préalable être initiés à certaines sciences auxiliaires : papyrologie, archéologie, épigraphie et paléographie grecques et latines. Les médiévistes doivent surtout consulter des chartes, des diplômes, des annales, des chroniques ; et les sciences auxiliaires dont la maîtrise leur est nécessaire sont, pour une partie au moins, spéciales à leurs études : paléographie des textes en langues vulgaires, chronologie chrétienne, diplomatique… Or, à quel moment le premier groupe de sources a-t-il, dans l’ensemble, cédé la place au second ? Précisément vers 400, et dans le cours du ve siècle. D’autre part, les historiens modernistes ont à leur disposition, outre des manuscrits, des documents imprimés ; de plus, manuscrites ou imprimées, ces sources sont surtout des rapports, des correspondances d’hommes d’État, d’ambassadeurs, et non plus des textes hagiographiques, des chroniques, des annales, des chartes. Pour recueillir et utiliser ces documents d’une nouvelle espèce, l’emploi de techniques nouvelles aussi est indispensable. À partir de quel instant s’est produite cette transformation ? À la fin du xve siècle. Aug. Molinier, arrêtant à la veille des guerres d’Italie ses travaux sur les sources de l’histoire du moyen âge, a pu écrire : « Au changement de politique répond un changement dans la nature des sources[1]. » L’axiome

  1. Les sources de l’histoire de France, t. V, p. 1.