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LE TAUROBOLE ET LE CULTE DE BELLONE

de Minerva Berecyntia[1]. Le titre de protectrice des Bérécyntes, ne suffit point à prouver que cette Minerve désigne la Cybèle habituelle, déification de la Terre, mais Cybèle semble bien avoir été assimilée ici à une divinité guerrière, comme Bellone[2]. Nous sommes donc amenés à croire que le baptême de sang, dont l’origine nous échappait jusqu’ici, a primitivement appartenu au culte de la Bellone asiatique et qu’il est arrivé du fond de la Cappadoce chez les Romains. Des considérations d’un autre ordre, comme nous allons le voir, confirment cette conclusion.


Le terme de taurobolium, ταυροβόλιον, devenu usuel à la fin du paganisme, n’est ni du latin, ni du grec ; c’est un de ces composés approximatifs comme en forme — on dirait mieux : en déforme — l’étymologie populaire. L’idée qu’on a prétendu exprimer par ce vocable anormal est celle de « frapper un taureau », mais βάλλειν ne se dit que d’une arme de jet (cf. εκηβόλος, κεραυνοβόλος), et un dérivé de la même racine caractérise fort mal l’action d’égorger une victime à l’aide d’un couteau de sacrifice[3]. Nous n’en sommes pas réduits, comme dans la plupart des cas, à retrouver par conjecture le mot primitif sous l’altération

  1. CIL, IX, 1538-1542 : Minervae Berecint(iae) ou Parachintiae, ou Paracentiae.
  2. Cf. Plut. Sylla, 9 : θεὸν (sc. Mâ, la déesse de Comane), ἣν τιμῶσι Ῥωμαῖοι παρὰ Καππαδοκῶν μαθόντες εἴτε Σελήνην οὖσαν εἴτε ᾿Αθηνᾶν εἴτε ᾿Ενυώ. — Ed. Meyer s’est déjà demandé si la Minerva Berecyntia ne serait pas la déesse Mâ, cf. Drexler dans Roscher s. v. Mâ, col. 2218 et les inscriptions Μᾶς ἀνιϰήτου, Rev. ét. gr., 1898, p. 169 ss. — Anahîta est de même identifiée à Athéna. Cf. Pauly-Wissowa, t. I, p. 2031.
  3. J’ai déjà insisté sur ce fait dans la Revue de Philologie, t. XVII, 1893, p. 195.