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Page:Revue d'histoire et de littérature religieuses-vol6-1901.djvu/116

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FRANZ CUMONT

vulgaire ; il nous est fourni par les textes eux-mêmes. Tauropolium est la forme qui apparaît dans la majorité des inscriptions les plus anciennes[1]. Qu’est-ce qu’un ταυροπόλιον ? C’est simplement un sacrifice offert à l’Artémis ταυροπόλος ou taurique[2], qui avait de nombreux adorateurs dans le monde hellénique et qu’on appelait par abréviation ή Ταυροπόλος, « le Tauropole[3]. »

Or, plusieurs divinités honorées dans l’est de l’Asie Mineure étaient identifiées à cette Artémis, dont le culte prétendait-on, avait été introduit dans le pays par Oreste, lorsque, après avoir failli être immolé en Tauride par Iphigénie, il s’était enfui avec sa sœur en apportant la statue de la déesse. On a voulu voir dans cette tradition souvent répétée la preuve d’antiques rapports entre la Chersonnèse et la Cappadoce[4]. Vraisemblablement l’origine de la légende ne doit être cherchée que dans le désir de rattacher à la mythologie hellénique l’ἱερὸς λόγος des temples asiatiques, et quelques ressemblances extérieures de leurs rites sanguinaires avec ceux qui auraient été pratiqués chez les Scythes, pouvaient suffire à des théologiens grecs pour proclamer l’identité des deux religions. Quoi qu’il en soit, il est certain qu’à Comane de Cappadoce on racontait, au temps de Strabon, qu’Oreste et Iphigénie avaient apporté de Scythie le culte de l’Artémis tauropole, et l’on ajoutait que les

  1. Elle est constante dans la série des inscriptions de Lectoure, CIL, XIII, 505 s. Cf. aussi CIL XII, index p. 926. — Le criobolium, l’aemobolium sont des créations récentes imaginées à l’imitation du taurobolium. Le premier a pour but d’établir dans le rite le dualisme qui existait dans le mythe de Cybèle et d’Attis.
  2. Hesychius s. v. Ταυροπόλια· ἃ εἰς ἑορτὴν ἄγουσιν Ἀρτέµιδι. Cf. Lebas-Waddington, no 741. — Son temple est aussi un ταυροπόλιον. Cf. Strabon, 639, C, cf. 766, C.
  3. CIG, 3137 = Michel, Recueil, 19, l. 62 et 71 ; CIG, 2699 ; Inschr. von Pergamon, 13 = Michel, 13, l. 25 et 53.
  4. Cf. Maury, Religions de la Grèce, t. III, p. 173 s. et surtout Drexler dans Roscher, Lexikon s. v. Mâ, p. 2219 s.