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Page:Revue d’économie politique, 1888.djvu/456

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tombée en esclavage, et le moindre manque de respect aux autorités ecclésiastiques était puni du supplice de la roue.

C’est en 1750 qu’une secte d’illustres philosophes, Turgot, Quesnay et nombre d’autres, portèrent sur ce sujet leur attention ; ils soutinrent qu’il y a une science du droit naturel, et que la misère qui les entourait avait pour cause la violation de ce droit naturel. Ils soutinrent qu’il y a une science des rapports de l’homme avec l’État, avec son semblable, avec la propriété. En 1759, ils publièrent un code de doctrine où ils proclamaient que la liberté de la personne, la liberté de l’opinion et la liberté du commerce ou des échanges sont les droits naturels de l’humanité, et où ils montraient l’erreur de la doctrine de la balance du commerce. Ils donnèrent à cette science le nom de « Économie politique. »

Ce sont donc les économistes qui ont les premiers proclamé qu’il y a une science de l’économie politique, et qui, ne se bornant pas à recommander la liberté du commerce comme chose profitable, l’ont affirmée comme un droit naturel de l’humanité. Ce sont eux qui ont trouvé la formule « production, répartition, consommation de la richesse, » et je dois solliciter toute votre attention pour la signification de cette formule, telle que ses créateurs l’ont expliquée.

Ils définissaient la « richesse, » les produits matériels de la terre mis dans le commerce et échangés, et ceux-là seulement. Ils appelaient « biens » les produits que le propriétaire consommait lui-même, « richesses, » ceux seulement qu’il échangeait.

Les fondateurs de la science économique moderne considéraient donc, comme les anciens, que la puissance d’échange est l’essence de la richesse, au sens technique du mot. Mais ils limitaient la richesse aux produits matériels ; ils se refusaient à y comprendre le travail et le crédit, disant que ce serait admettre qu’on peut créer de rien la richesse, et répétant constamment : ex nihilo nihil fit. Ils maintenaient donc que la terre est l’unique source de la richesse.

Or, il est contraire aux lois de la science naturelle d’admettre que la puissance d’échange est le principe de la richesse, et de restreindre cette idée aux produits matériels. Bacon fait à maintes reprises observer que, quand on a une fois déterminé le principe ou qualité qui est la base d’une science, on doit rechercher