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Page:Revue de Belgique, série 2, volumes 58-59, 1910.djvu/365

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très fréquentes ; la mesure varie souvent. (Dans l’adagio de la 5e symphonie, les mesures à 6 et à 4 temps marchent parallèlement).

La symphonie brucknérienne constitue donc une œuvre forte, d’un intérêt indiscutable. On lui a reproché la froideur, l’extravagance. Mais, prenez dans les thèmes des 4e, 7e et 9e symphonies pour ne citer que les plus connus ; existe-t-il de semblables expansions musicales ? Quelle architecture colossale, quelle ossature gigantesque ! Un souffle génial empreint toutes ces œuvres et l’on peut dire que, si certains musiciens prétendent nier le plan général chez Bruckner, c’est qu’ils ne comprennent par la grandeur de l’œuvre et que la forme est trop grande pour leur intelligence.

Bruckner a cherché à donner des proportions monumentales aux conceptions que lui inspirait l’orgue ; car, organiste de premier ordre, il concevait d’abord ses œuvres pour l’orgue.

Tels furent donc en Bruckner, l’homme et l’artiste ; n’en avons-nous pas assez dit pour qu’à nos yeux un devoir impérieux s’impose aux musiciens consciencieux, celui d’étudier de façon approfondie l’œuvre du maître, dont les qualités sévères ne furent pas favorables à une prompte popularité, mais ont une autre efficacité d’action que le charme fragile de tant d’autres ; ce n’est pas une étude superficielle à laquelle il convie, mais une étude lente et consciencieuse. Et alors, quelle jouissance pour celui qui pénétrera dans l’intimité du maître, qui vivra, en quelque sorte avec ses symphonies et qui, sans s’en tenir à l’impression première, voudra analyser scrupuleusement et impartialement[1] !

  1. La première apparition du nom de Bruckner, en France, comme compositeur symphoniste eut lieu en 1896, aux Concerts Lamoureux (exécution de la 3e symphonie). En Belgique, c’est à Sylvain Dupuis que revient l’honneur d’avoir dirigé la première exécution brucknérienne intégrale, à Liège, en 1895 (7e symphonie).