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2. La théorie générale.


Avec Gauss, Cauchy, Riemann, Weierstrass, la notion précise de ce qu’on doit entendre par fonction analytique était acquise. La théorie en était faite, au fond, sur le modèle qu’offrait naturellement l’Algèbre. Toute fonction analytique peut être représentée dans tout domaine suffisamment restreint, sauf au voisinage de certains points (dits points singuliers) par un développement en série entière.

Certaines d’entre elles peuvent être ainsi représentées par un développement unique, pour toutes les valeurs de la ou les variables : ce sont les fonctions entières qui sont dans le domaine transcendant l’analogue des polynômes dans le domaine algébrique.

Dans le cas d’une seule variable indépendante, Weierstrass avait réussi à étendre à ces fonctions le théorème de décomposition en facteurs.

Après ces fonctions entières viennent les fonctions méromorphes, analogues aux fonctions rationnelles et qui se comportent comme elles au voisinage d’un point quelconque (à distance finie). Grâce au théorème qui lui a donné la décomposition en facteurs, Weierstrass montre qu’une fonction méromorphe d’une seule variable est le quotient de deux fonctions entières.

Ces deux cas sont les plus simples. D’autres beaucoup plus compliqués peuvent se présenter, même si l’on se borne aux fonctions bien déterminées, ou, suivant l’expression consacrée, uniformes. Les travaux déjà mentionnés de Poincaré étaient venus offrir à cet égard de remarquables exemples[1].

Mais les fonctions uniformes, c’est-à-dire dont la valeur est unique et déterminée sans ambiguïté pour chaque valeur de la variable indépendante, sont loin d’être la règle. Dès l’algèbre la plus élémentaire on rencontre des fonctions, — par exemple √x — qui ne satisfont pas à cette condition.

La grande difficulté de la théorie est précisément l’existence des fonctions non uniformes, qui, en un certain sens, mettent en défaut la définition même de la notion de fonction.

De ces fonctions non uniformes, on n’avait qu’une notion pure-

  1. Les fonctions fuchsiennes offrent des lignes singulières ; celles qui figurent dans le travail de 1879 (Thèse de doctorat) des espaces lacunaires ou portions de plan singulières.