Page:Revue de Paris, 40è année, Tome IV, Juil-Août 1933.djvu/469

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et du midi de la France deux manuscrits de tragédies en cinq actes et en vers. Surtout des poètes des deux sexes continuent d’y écrire et d’y faire imprimer des poésies lamartiniennes.

Le Parnasse n’a pas manqué de respect à Lamartine lui-même. Mais il s’est prononcé avec sévérité contre les imitateurs faciles du poète, leurs terres natales, leurs cloches de village, leur chien, leur chat, leurs Elvires en série. Ces imitateurs étaient plus ou moins des poètes de province, vivant en province : la gloire vraie du poète en souffrit, et parut longtemps exilée en province, comme au temps de Boileau, la Pharsale de Brebeuf. Lamartine d’ailleurs n’avait-il pas le premier fait entrer dans la poésie le génie conscient de sa terre, l’âme d’une grande province, tout ce qui allait fleurir plus tard sous les noms de racinement et de régionalisme ? N’avait-il pas donné l’investiture à Mistral, offert à la seule poésie authentique de province, celle de Provence, son arc triomphal ? Milly et Saint-Point sont devenus comme une capitale de la poésie des régions.

Il y a chez Lamartine un certains fonds lyonnais. Lyon, capitale de sa jeunesse, était la capitale de sa région. Né l’année même de la division de la France en départements, il appartient au point frontière de la Bourgogne qui n’est attiré que par Lyon et nullement par Dijon. Il y a toute une histoire lyonnaise de Lamartine. Ce chrétien démocrate possède comme Lyon, dans l’enceinte de son vaste génie, sa colline inspirée de Fourvière et sa Croix-Rouge révolutionnaire. Nous retrouvons dans Chenavard ses grandes ambitions épiques. On ne s’étonnera donc pas qu’en 1870 le chef, en France, des lamartiniens de province soit un Lyonnais, spiritualiste et républicain, Victor de Laprade.

À la vérité, pas plus que Lamartine, Laprade n’est Lyonnais. Mais de son pays, le Forez, Lyon est la capitale absorbante, comme Paris pour l’Île-de-France. Successeur d’Alfred de Musset à l’Académie française, destitué par l’Empire d’une chaire de littérature qu’il occupait à la Faculté des Lettres de Lyon, il obtint une grande réputation poétique, une place d’honneur dans les morceaux choisis, où il est encore, pour des poésies épiques et oratoires d’une inspiration, comme