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LE SOVIET DE PÉTROGRAD

Le Soviet se compose de diverses fractions des partis socialistes, et notamment du « parti social-démocrate ». Ce parti qui adopte la formule marxiste de la lutte des classes comprend deux éléments : un dit maximaliste bolchéviki, opposé à toute collaboration avec un gouvernement bourgeois, adepte d’une action révolutionnaire systématique ; l’autre, minimaliste mencheviki, qui, depuis la crise de 1905, s’était déclaré en faveur d’une collaboration loyale avec la Douma. La scission entre ces deux fractions s’est affirmée au Congrès de Londres en 1909 ; elle a persisté, ranimée par des querelles intestines, et elle a éclaté plus forte que jamais après la Révolution de 1917.

Dans l’intervalle, l’élément modéré a obtenu la majorité. Le président et la majorité des vice-présidents du Soviet appartiennent à cette nuance. Les minimalistes sont soutenus par les « Socialistes-révolutionnaires » qui professent une espèce de communisme rural, prenant son point de départ dans le mir (propriété collective de la commune rurale en Russie). Par leurs origines et par leurs attaches ainsi que par leurs traditions, les socialistes révolutionnaires exercent une action particulière sur les masses rurales, notamment depuis la constitution d’un parti paysan, au cours de la première Douma qui avait compté près de 190 députés paysans. Les paysans, n’ayant pas de cadres à eux, avaient emprunté, pour les élections au second degré, ceux des Socialistes révolutionnaires et ils se fondirent plus tard dans le grand parti des travaillistes. Le terme « travailliste » fut employé pour la première fois à Saratoff, où l’on désigne par le terme troudoviki (travaillistes) ceux qui travaillent la terre ou qui vivent du produit de leur travail manuel dans les usines. Les travaillistes, représentés par Kerenski, celui qu’on appelle le Danton russe, les socialistes-révolutionnaires, ayant comme interprète Victor Tchernoff, se sont unis à la majorité modérée des social-démocrates avec, en tête, Tzeretelli, homme de grand talent, Sokoloff, homme de beaucoup d’énergie et de séduction, Tchkeidzé, un vétéran des luttes politiques, qui préside le Soviet de Pétrograd et qui a été également désigné pour présider le Congrès de tous les Soviets régionaux, récemment clos.