Page:Revue de Paris - 1900 - tome 4.djvu/434

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
428
LA REVUE DE PARIS

leurs solides mâchoires, leur cou de taureau, tout en eux rappelait les profils consulaires. Par leur attitude exempte de toute obséquiosité servile, ils se montraient dignes de leur charge.

Les six compagnons, que la ferveur avait rendus égaux, prirent les branches et les répandirent sur le cercueil du héros.

Très nobles étaient ces lauriers latins, coupés sur la colline où, en des temps reculés, les aigles descendaient pour apporter les présages, où, en des temps nouveaux et cependant fabuleux, un fleuve de sang fut versé pour la beauté de l’Italie par les légionnaires du Libérateur. Ils avaient les branches droites, robustes, sombres, les feuilles dures, fortement nervées et marginées, vertes comme le bronze des fontaines, riches d’un arôme triomphal.

Et ils voyagèrent vers la colline septentrionale encore endormie sous le gel, tandis que les troncs insignes poussaient déjà leurs branches nouvelles dans la lumière de Rome, au murmure des sources cachées.


Gabriele d’Annunzio
(Traduction de G. Hérelle.)