Page:Revue de Paris - 1901 - tome 1.djvu/105

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

occasion, je glissai de la fenêtre dans la pièce et, esquivant la vieille, je séparai de sa jumelle, qui la supportait, une des petites dynamos, et j’envoyai tout l’appareil s’écraser sur le parquet. Ah ! leur épouvante !… Pendant qu’ils essayaient de s’expliquer la chose, je me faufilai dehors et je descendis avec précaution l’escalier.

» Au rez-de-chaussée, j’entrai dans une petite pièce où j’attendis. Ils finirent par descendre, eux aussi, toujours inquiets, toujours disputant, tous un peu désappointés de n’avoir pas trouvé « d’horreurs », et se demandant quelle était leur situation légale à mon égard. Dès qu’ils furent en bas, je me faufilai de nouveau, je remontai avec une boîte d’allumettes, je mis le feu à mon tas de papiers et de saletés, j’approchai les chaises et la litière, j’amenai le gaz avec un tuyau de caoutchouc…

— Vous avez mis le feu à la maison ? s’écria Kemp.

— Oui, j’ai mis le feu ! C’était la seule manière de brouiller ma piste. Et, d’ailleurs, la maison était certainement assurée… Je tirai tranquillement les verrous de la porte d’entrée et me voilà dans la rue ! J’étais invisible et je commençais seulement à me rendre compte de l’avantage extraordinaire que me donnait cette qualité. Ma tête fourmillait déjà de projets insensés et merveilleux que je pouvais dès lors mettre à exécution impunément.


XXI

DANS OXFORD STREET


» En descendant l’escalier, la première fois, j’avais trouvé une difficulté imprévue : je ne voyais pas mes pieds ; je trébuchai à deux reprises. De même, il y eut une gaucherie singulière dans ma façon de saisir le verrou : je ne voyais pas mes mains… Cependant, à condition de ne pas regarder par terre, je parvins à marcher assez bien sur le terrain plat.

» Mon état d’esprit, vous devez le comprendre, était l’exaltation. J’éprouvais la sensation d’un voyant qui marcherait, avec les pieds enveloppés d’ouate et des vêtements qui ne