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Ces mots parurent faire impression sur Lily : les plaisanteries de Selden semblaient le bouillonnement de son humeur intime, à elle.

— Est-ce là ce que vous feriez en pareille circonstance ? demanda-t-elle.

Selden la regarda d’un air solennel.

— Je suis ici pour vous prouver — s’écria-t-il — ce que je suis capable de faire en certaine circonstance !

— Marcher à la vitesse d’un mille à l’heure… reconnaissez que l’omnibus irait plus vite !

— Ah mais, lui, vous trouvera-t-il en fin de compte ? C’est là seulement qu’on verra s’il a réussi !

Ils se regardèrent avec le même plaisir qu’ils avaient goûté à échanger des absurdités, chez lui, par-dessus la table à thé ; mais tout à coup la figure de Lily changea :

— Eh bien, si vous dites vrai, il a réussi !

Selden, suivant son regard, aperçut un groupe de personnes qui s’avançaient là-bas, au tournant du sentier. Lady Cressida avait évidemment insisté pour que l’on rentrât à pied, et le reste des fidèles avait considéré comme un devoir de l’accompagner. Selden examina rapidement les deux hommes qui se trouvaient là : Wetherall, qui marchait respectueusement aux côtés de lady Cressida, avec son regard oblique, attentif et nerveux, et Percy Gryce fermant la marche avec Mrs. Wetherall et les petites Trenor.

— Ah !… Je comprends maintenant pourquoi vous vous intéressiez tant aux Americana ! — s’écria Selden sur le ton de la plus franche admiration.

Mais la rougeur de miss Bart, à cette boutade, coupa court à tous les développements qu’il aurait voulu lui donner.

Lily Bart n’aimait donc pas qu’on la plaisantât sur ses adorateurs, ou même sur ses moyens de les attirer ! C’était là pour Selden un phénomène nouveau : un éclair de surprise illumina devant lui tout un monde de possibilités. Mais elle se redressa bravement pour défendre son trouble, et s’écria, comme celui qui l’avait causé approchait :

— Voilà pourquoi je vous attendais… pour vous remercier de m’avoir donné toutes ces indications !

— Ah vous ne pouvez guère me rendre justice à ce sujet