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LA REVUE DE PARIS

En quelques jours, du 17 avril au 7 mai, le Comptoir de Paris, seul, avait escompté pour une somme de 30 millions, et bientôt plus de cent Comptoirs semblables distribuaient à la France le bienfait de cette institution. La création des magasins généraux et des sous-comptoirs due à la même initiative en compléta l’économie : la véritable banque du Commerce et de l’Industrie était fondée.

La lettre de change fut affranchie de l’obligation des trois signatures ; des bureaux de renseignements, statistique quotidienne de l’offre et de la demande mise au service des ouvriers et des patrons, furent ouverts dans les mairies. Enfin il est permis de dire qu’en trois mois ce gouvernement avait fait pour le travail et pour l’industrie plus qu’aucun des siècles qui l’avaient précédé et qui lui léguaient une si lourde tache.

Les tableaux d’exportations et d’importations témoignent que, sous l’impulsion de ces mesures, le commerce, quelques mois après les journées de Février, avait repris un élan qui permettait d’espérer un avenir meilleur. Pourtant, à cette époque, tout languit encore et tout semble en question.


La réforme politique avait-elle été moins hardiment entreprise ? Non ! Un mois après la Révolution, la France avait non seulement ressaisi toutes les conquêtes de 89, mais elle en avait réalisé toutes les promesses. Une égalité réelle était devenue la base de la Constitution provisoire qui n’attendait plus que la consécration du pays. La liberté des réunions est assurée ; la liberté de la presse rendue vraiment complète par la suppression du timbre ; le suffrage universel, investi du droit de gouverner la France ; l’homme, arraché au servage politique du cens électoral ; la nation, émancipée !

En quelques jours, soutenu par le concours d’un nombre immense de généreux citoyens, le Gouvernement provisoire avait accompli, non pas seulement cette œuvre presque surhumaine de soutenir l’édifice d’une société ébranlée par le vice de ses institutions, mais celle plus difficile de jeter les bases d’un monde nouveau. Il semblait que la France dût marcher sans effort dans le large et fécond chemin que lui ouvrait la seconde République. Pourtant il n’en est rien. Alors que les finances sont rétablies, l’impulsion et la confiance rendues à l’activité