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par des tziganes qui étaient peut-être de Montmartre. Le commerce de vin de Bordeaux témoigna, lui aussi, son admiration : deux courtiers et le fils d’un grand négociant rôdaient fréquemment autour du chalet des Kérouall.

Enfin les derniers jours de vacances s’égrenèrent, ainsi qu’il arrive toujours, bien plus vite que les premiers. Louise partit.

À Paris, Fernand devait l’attendre à la gare. Il le lui avait demandé si instamment qu’elle avait trompé Félicité sur l’heure de son retour et l’avait ensuite déroutée par une dépêche pour qu’elle ne vînt pas à sa rencontre.

Fernand fut d’une telle joie en revoyant Louise qu’il semblait qu’il ne l’eût conquise que ce matin-là.

Il l’emporta comme une proie vers sa voiture, puis, après l’avoir longtemps serrée entre ses bras, il dit en la regardant :

— Et tu es vraiment une fée… ma fée… Depuis que tu es à moi, il semble que la chance et le succès soient entrés dans ma vie. Tout me réussit au delà de mon espoir. Aussi je te ferai heureuse et riche à l’égal d’une princesse.

Louise ne prêtait qu’une attention distraite à ces propos qui lui paraissaient vains et chimériques. Elle souriait doucement ; elle souriait aussi à Paris, la ville accueillante et charmante où les femmes sont reines. Elle revit les quais, d’une grâce si noble, et, près du pont Royal, elle se pencha pour regarder au fond Notre-Dame et la Sainte-Chapelle.

L’appartement de la rue d’Anjou était fleuri de roses auxquelles se mêlaient les premiers chrysanthèmes. Louise et Fernand déjeunèrent de café au lait, à la mode viennoise.

Dans la chambre à coucher, il voulut, parmi ses cheveux, poser des fleurs en diamants, et, comme elle se défendait, il dit :

— Ma bien-aimée, c’est en signe d’adoration. Chez nous, en Autriche, on est mystique et religieux : nos Vierges ont des bijoux aussi beaux que ceux de nos impératrices.

Louise lui trouvait de l’enfantillage et un peu de folie, mais elle fut tout de même touchée et se donna plus tendrement qu’elle ne l’avait fait encore.

Dans l’après-midi, en la reconduisant chez elle, il dit :

— Cela ne pourra pas toujours durer, ton petit emploi de