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l’état et les chemins de fer

mot, un socialiste. Et pourtant, il ne faut pas creuser beaucoup pour reconnaître que, par des motifs différents, mais également décisifs, l’émission des billets de banque n’a rien de plus à faire avec la liberté du travail que la construction et l’exploitation des chemins de fer avec la liberté de l’industrie.

On sait que la formule : Laisser faire, laisser passer, ainsi traduite : Libre concurrence et libre échange, a été adoptée par l’école de Manchester et poussée par cette école à ses dernières limites. Mais on sait aussi qu’une réaction énergique contre cet excessif individualisme est en train de s’opérer en Allemagne sous le nom de Socialisme de la chaire. Une fraction notable, si ce n’est même la majorité, des professeurs d’économie politique et sociale des universités de ce pays se sont déclarés résolus à préconiser dans certaines limites l’intervention de l’État en matière d’industrie. Ces réformateurs ont déclaré vouloir se placer dans une position intermédiaire entre le socialisme qui fait trop intervenir l’État et le manchesterianisme qui ne le fait pas intervenir assez. D’Allemagne, le socialisme de la chaire a déjà passé en Italie où beaucoup d’hommes distingués, et même plusieurs économistes éminents, lui ont donné leur adhésion. Inutile d’ajouter que les chemins de fer et les billets de banque sont au nombre des manifestations de l’industrie et du crédit dans lesquelles on se réserve d’appeler l’intervention de l’État. Mais, à vrai dire, on ne voit pas jusqu’ici que les économistes de la nouvelle école se montrent fort supérieurs à ceux de l’ancienne quant à la manière d’établir leurs conclusions. Ces anciens économistes affirmaient le laisser faire, laisser passer ; les nouveaux affirment l’intervention de l’État ; mais ni les uns ni les autres ne démontrent rien. Or, c’est d’affirmations gratuites surtout que nous sommes las, et ce serait surtout de démonstrations rigoureuses que nous aurions besoin. Ce que nous reprochons, en somme, à M. Michel Chevalier c’est moins encore de conclure en matière de chemins de fer et de billets de banque à la liberté de l’industrie et du travail que de ne fonder cette conclusion sur aucune base quelconque, soit rationnelle soit expérimentale. Aussi ne saurait-il nous suffire d’entendre les socialistes de la chaire nous donner l’assurance qu’ils feront intervenir l’État en matière de chemins de fer, qu’ils le feront intervenir un