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Page:Revue de droit public - 1897 - A4T7.djvu/434

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encore et par surcroît celle de maintenir sur le marché plusieurs prix de vente correspondant aux sacrifices maxima des consommateurs. Ainsi, dans l’exemple que nous avons choisi d’une fourniture d’eau ou de gaz, ce ne serait pas assez que le concessionnaire fit un bénéfice de monopole de 3.000 fr. par jour en livrant à la consommation 1.000 mètres cubes à 5 fr. au lieu de 5.000 mètres cubes à 2 fr. ; il faudrait encore qu’en maintenant les deux prix supérieurs de 90 fr. et 50 fr. et le prix inférieur de 3 fr. à côté du prix de 5 fr., par telles ou telles combinaisons, comme en servant certains abonnes avant les autres, à des heures spéciales, il portât le bénéfice de 3.000 fr. à 5.500 fr. ? Nous pensons, pour notre part, que, s’il y a lieu de prévenir la première de ces deux conséquences du monopole, il y a d’autant plus lieu d’empêcher la seconde. Et nous déclarons sans hésiter que, s’il faut subir la multiplicité des prix dans le cas de monopole de droit ou d’intérêt général, il faut, en dehors de ces cas, y voir une raison de plus de transformer les monopoles de fait en monopoles d’État économiques.


II.
DES CHEMINS DE FER COMME SERVICES ET COMME MONOPOLES ÉCONOMIQUES


Les chemins de fer sont des chemins assujettis à certaines conditions de pente, de courbure, et garnis de rails sur lesquels roulent des convois de voyageurs et de marchandises traînés par des locomotives. Ils se classent à côté des routes et des canaux parmi les voies de communication ; mais ils s’en distinguent et se caractérisent spécialement par la solidarité qui y résulte de l’emploi des rails entre ces trois éléments de tout transport : la voie, d’une part, le véhicule et le moteur, de l’autre. On s’était figuré, au début, pouvoir laisser, sur les chemins de fer comme sur les routes et les canaux, la liberté du parcours à divers entrepreneurs de transport ; mais on a bien vite reconnu que l’entrepreneur du transport devait y être en même temps l’exploitant de la voie, et qu’il devait percevoir à la fois le péage, ou loyer de cette voie, et le frêt, ou loyer du véhicule et du moteur. Toutefois, comme c’est le rôle propre de la science de distinguer par abstraction ce qui est confondu dans la réalité,