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employés et celle des voyageurs compromise, puis marchandée. En ce sens, le public réaliserait encore le gain actuellement réalisé par les actionnaires.

Au surplus, il existe une solution à cette difficulté. Admettons qu’en matière de chemins de fer le côté des services privés l’emporte sur celui des services publics, et qu’à ce titre leur exploitation réclame impérieusement cet esprit d’âpreté mercantile qui est le ressort des affaires agricoles, industrielles, commerciales et financières mais qui est incompatible avec l’exercice des fonctions publiques. Il y a, nous l’avons reconnu, un moyen de séparer les monopoles économiques des monopoles moraux et de les faire rentrer dans les conditions de la concurrence : c’est de mettre ces monopoles en adjudication pour en faire la concession au mieux de l’intérêt général. Quoi de plus applicable à l’industrie des chemins de fer ? Selon qu’on voudra que l’entreprise soit faite au prix de revient ou au prix de produit net maximum, on fera l’adjudication au rabais ou à l’enchère, le rabais portant, dans le premier cas, sur les tarifs offerts au public, l’enchère portant, dans le second cas, sur le fermage à payer à l’État. Les chemins de fer, toujours construits pour le compte de l’État, au moyen d’un capital-obligations emprunté et garanti par l’État, seraient ainsi remis à des compagnies fermières pour être exploités par elles à forfait. Dans le système de l’exploitation au prix de revient, le fermage à payer serait égal au montant des intérêts des obligations, et les tarifs déterminés en raison de ces intérêts et des autres frais, généraux et spéciaux. Dans le système de l’exploitation au prix de produit net maximum, les tarifs seraient déterminés en raison de la loi du débit ou de la consommation, et l’État construirait des lignes pour le montant des capitaux dont il pourrait servir l’intérêt. Tout porte à croire que de telles compagnies, ainsi replacées dans les conditions normales des entreprises industrielles et soumises effectivement au régime de la libre concurrence, déploieraient l’activité et l’intelligence dont, jusqu’ici, n’ont fait preuve ni les compagnies ni l’État lui-même.

Assurément, cette solution ne serait pas sans complications et sans difficultés. Si l’État était propriétaire non seulement de