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Page:Revue de l'art ancien et moderne, juillet 1906.djvu/140

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LA PEINTURE ALLEMANDE DU XIXe SIÈCLE 109 Bocklin (1827-190:1) est le plus grand et c'est aussi le représentant le plus direct du vieil art allemand ; il procède de Schirmer et de Preller dans le paysage, de Schwind dans le conte fantastique, des Nazaréens dans ses tableaux de piété, de Cornélius dans le genre symbolique. Sa technique est celle de l'école de Piloty ; nul n'étudia plus consciencieu- sement les procédés des maîtres du passé, surtout les Vénitiens et Rubens; mais ses études ne l'empêchèrent pas de se rendre original; aucun colo- riste, aucun technicien ne fut plus hardi, encore qu'il ait négligé les empâtements. Cependant, Bocklin vaut surtout par l'inspiration. C'est l'un des grands paysagistes de tous les temps ; s'il ne copiait pas la nature comme les maîtres de l'école française, nul ne s'en est plus intimement inspiré, nul n'a rendu d'une manière plus saisissante le caractère et même le sentiment d'une région ou d'une saison. Et Bocklin est aussi un prodi- gieux évocateur ; il s'est créé sa propre mythologie ; ses centaures, ses faunes, ses tritons, ses nymphes, nous semblent vivants, non pas seulement comme ceux de la Grèce qui étaient idéalisés, mais comme des êtres d'aujourd'hui. Ce que Bocklin fit pour le paysage et les sujets mythologiques, Lenbach (1836-1904) le fit pour le portrait ; s'il se conforma aux conseils de Piloty et copia la technique des vieux maîtres, il sut faire siens les procédés empruntés. Sa gloire, il la doit surtout à ces deux qualités bien allemandes : le sérieux et le sens psychologique. Aucun portraitiste n'a comme lui rendu l'esprit et les sentiments de ses modèles, et ses modèles étaient Bismarck, Moltke, Gladstone, Léon XIII, Dôllinger, Wagner, Helmholtz, Mommsen, etc. Menzel (1815-1905) a traité les genres les plus variés ; la première moitié de sa vie artistique fut surtout consacrée à la peinture d'histoire ; la seconde à la peinture de la vie moderne. Comme dessinateur, tous l'ont proclamé hors de pair, mais ses qualités de peintre sont moins généra- lement reconnues. Sans doute, il y a quelques réserves à faire sur ses tableaux d'histoire ; on sent qu'il cherchait à concilier l'art classique et le souci de la couleur locale avec son goût de plus en plus marqué pour la peinture du plein air et même l'impressionnisme ; mais il fond bien les disparates dans ses tableaux en clair obscur ; malgré quelques écailles, le Concert de flûte à Sans-Souci s'est patiné comme une belle toile