Page:Revue de l'art ancien et moderne, juillet 1906.djvu/434

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A PROPOS DE L'EXPOSITION COURBET AU GRAND PALAIS 357 rera désormais, pour ceux qui viendront, un avertissement sauveur, comme ces bouées qui, flottant au-dessus des abîmes, conseillent de loin aux frégates perdues de chercher un chemin plus sûr». En effet, les neveux de Courbet, nos réalistes d'aujourd'hui, les Charles Cottet, les Lucien Simon, n'ont pas été au delà. Après l'Enterrement, Courbet ne s'est pas «dépassé» en tant que réaliste.Il s'est surpassé en tant que peintre, et de belles oeuvres, — hélas! la brasserie et la politique nous en ont ravi combien d'autres ? —jalonnent son évolution. Il faut citer : les Demoiselles de village; les Baigneuses, qui firent scandale, elles aussi ; le beau et clair tableau des Cribleuses de blé, dont s'enorgueillit le musée de Nantes; la Rencontre ; l'Atelier, cette fameuse «allégorie réelle » qui parut à l'exposition particulière de 1855, — «l'un des ouvrages les plus singuliers de ce temps», écrivait Delacroix, — etoùse trouve, entre autres parties splendides, le plus beau morceau de nu que Courbet ait peint; — les Demoiselles des bords de la Seine, du Petit Palais, oeuvre datée de 1857, et qui, en dépit de quelques duretés dans le dessin, s'im- pose par la richesse intime et profonde du coloris, l'intensité de l'harmonie, l'éclat de la matière, la magistrale et subtile exécution des étoffes que la lumière caresse et pénètre, la large beauté du paysage, et où enfin il faut admirer dans les figures une recherche, ou plutôt une trouvaille de carac- tère et d'expression, par quoi ce tableau se place dans l'oeuvre du maître d'Ornans, comme une page de moeurs unique; — ensuite : le Combat de cerfs, la Femme couchée, les Trois baigneuses, etc., — et combien de paysages et de marines ! Les paysages ? Si l'on n'a pas coutume de comprendre Courbet parmi les purs paysagistes, parce que son originalité principale est d'avoir introduit l'homme dans la nature, il n'en est pas moins un paysagiste de premier rang, — et même, quelle que soit sa puissance en tant que peintre de l'humanité contemporaine, il ne serait pas très audacieux de dire qu'il est avant tout un peintre de paysages... A la réflexion, cela est peut-être tout de même un peu paradoxal..., mais il est une chose frappante : c'est que, assez souvent, quand Courbet nous montre des figures dans un paysage, c'est le paysage surtout qui est beau. Ou plutôt les figures, — humaines ou animales, — ont leur valeur particulière si on les isole du paysage, mais elles ne sont pas toujours parfaitement d'accord avec celui-ci. Delà-