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Page:Revue de l'art ancien et moderne, juillet 1906.djvu/523

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430 LA REVUE DE L'ART par les grands de la peinture espagnole, les Velazquez et les Murillo. Leurs panneaux, logés, les uns dans les petites salles dites d'Alphonse XII, où la plupart d'entre eux restent attribués aux écoles flamande et allemande, les autres à l'entrée de la grande galerie, où ils font antichambre, obtiennent à peine un regard des visiteurs, qui se hâtent vers les oeuvres fameuses. M. Lefort est à peu près le seul qui leur ait fait la charité d'une citation ou d'une vignette. En dehors de Madrid, la seule ville de l'Espagne centrale dont le musée contienne aujourd'hui des panneaux archaïques est l'ancienne capitale, Valladolid. Ces tableaux restent inconnus, au premier étage du palais de Santa Cruz, tandis que les sculptures polychromes du rez-de- chaussée comptent parmi les oeuvres les plus célèbres de l'art espagnol. Les panneaux castillans n'ont point été admis à figurer dans les publica- tions volumineuses que le gouvernement a commencées avec pompe et laissées inachevées : les Monumentos arquitectonicos et le Museo espanol de antigùedades. On ne trouvera, dans le désordre des gravures et des chromolithographies qui accompagnent les recueils officiels, que des tableaux de l'Académie de l'Histoire et du Musée archéologique, qui représentent les premières écoles d'Aragon. Le privilège accordé aux oeuvres de cette région n'est sans doute point dû au hasard. C'est un peintre aragonais, D. A'alentin Carderera, qui avait été chargé de présider à l'inventaire des monastères supprimés. Artiste et savant, il s'acquitta de sa mission avec un zèle d'apôtre. En parcourant, crayon à la main, les églises et les couvents les plus éloignés des routes, il réunit les matériaux des deux volumes de l'Iconografia espanola, publiés de 1855 à 1864, et qui conservent, dans leurs gravures, la silhouette de plus d'un monument aujourd'hui mutilé ou détruit. Carderera forma encore, avec les documents graphiques qu'il ne put faire reproduire, des porte- feuilles abondamment garnis, et, avec quelques panneaux anciens décou- verts en Aragon après l'inventaire, une collection petite et précieuse. Il fut le Gaignières de l'Espagne. Les estampes et les dessins qu'il avait réunis et qui formaient un cabinet royal, furent acquis par la Biblio- thèque nationale de Madrid. Quant aux tableaux, Carderera lui-même les • légua en 1880 à sa ville natale, Huesca, où ils forment un musée provin- cial, dans la plus grande salle d'un palais délabré, dont l'écusson gigan- tesque est celui de Charles-Quint.