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assemblage savamment agencé de gemmes aux nuances multiples. Il nous présente aujourd’hui, dans ce genre, une statuette égyptisante en lapis, jade, jaspe et opale. Cette œuvre, qui a nécessité un long labeur, est intéressante à étudier comme effet produit et comme procédé technique ; mais on dirait, en vérité, que les difficultés du travail ont entravé l’essor du talent de l’artiste qui, dans d’autres cas, a su donner à ses œuvres plus de grâce, de mouvement et d’esprit. La froide correction du style, dans le beau camée du même maître, l’Aube, sur une sardonyx aux nuances agréables, est aussi son principal défaut ; la radieuse envolée, la sveltesse, l’espérance qu’inspire le jour naissant, voilà ce qu’un lithoglyphe de génie nous aurait traduit en interprétant un sujet qui réclame autre chose qu’un dessin d’une pureté académique et une expérience consommée dans l’exécution technique.

M. Gustave Lambert, lui aussi, persiste dans la gravure des fines intailles sur sardonyx et sur cornaline ; l’une d’elles, Femme distribuant du pain à ses enfants, mérite d’attirer l’attention. Il faut encore s’arrêter devant le bas-relief en cristal de roche de M. E. Jamain, Idylle, qui représente un pâtre grec assis sur un rocher et jouant de la double flûte. M. Charles Schneider a un joli portrait sur camée et une allégorie pleine de rêverie et de sentiment sur un onyx noir et blanc.

Mais ces quelques œuvres dignes d’intérêt, que sont-elles, dirons-nous, auprès des merveilleux camées et intailles, signés de Jacques Guay, le protégé de Mme de Pompadour, qu’on a groupés sous une vitrine de l’Exposition du XVIIIe siècle, ouverte en ce moment à la Bibliothèque nationale ? La comparaison est éloquente, écrasante ; elle explique, si elle ne justifie pas entièrement, l’attitude du public éclairé vis-à-vis des œuvres d’aujourd’hui, et, par réciprocité, l’engouement du XVIIIe siècle pour la glyptique des gemmes est justifié par les chefs-d’œuvre que cet art a su produire. Et n’est-il pas singulier qu’à notre époque, où les procédés mécaniques sont si perfectionnés, où l’artiste se fait un jeu des difficultés matérielles que comportait jadis la gravure des quartz et des corindons, l’expression artistique et le rendu des formes n’aient pas su profiter de ces facilités techniques ? Tant il est vrai de dire que le développement et le perfectionnement du procédé scientifique ne favorisent en quoi que ce soit l’essor artistique. On le constate, d’ailleurs, aussi bien dans la médaille que dans