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Page:Revue de l'histoire de Versailles et de Seine-et-Oise, année 1919.djvu/181

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les souvenirs de m. j.-a. le roi.

Bibliothèque. Il était accompagné de son fils et d’aides de camp. Il a regardé avec intérêt le livre des Fêtes de Versailles et a été fort aimable.

Lundi 28 Novembre 1870.

Quelle longue interruption ! Hélas ! Dieu a ajouté à toutes les peines que j’éprouve en ce moment la maladie. Le premier de ce mois, j’ai été saisi de la fièvre au couvent Saint-Martin, en pensant mes malades avec G… Rentré chez moi, j’ai été pris d’un point pleurétique et je me remets à écrire aujourd’hui pour la première fois. Malheureusement, nous ne sommes pas plus avancés aujourd’hui que le jour où j’ai cessé d’écrire. Les Prussiens sont toujours ici et Paris canonne presque tous les jours. Quand donc, mon Dieu, finira cette terrible tragédie ? En attendant, Versailles a toujours le même aspect. Plusieurs faits on eu lieu depuis ma maladie : D’abord, MM. Harel et [de Raynal][1], substituts du procureur de la République, ont été emmenés prisonniers en Prusse, ainsi que [M. Thiroux][1], directeur de la poste. Les deux premiers avaient pu écrire à Paris et en avoir réponse ; l’ennemi l’a su et ils ont été considérés comme entretenant des correspondances avec l’ennemi ; le troisième, qui faisait parvenir des lettres en cachette, a été considéré de même. On m’a dit aussi que M. Guillemain, président du Tribunal, avait annoncé au préfet prussien qu’il allait rouvrir le tribunal. Celui-ci lui a dit de rendre la justice au nom du gouvernement déchu ; le président s’y est refusé et le tribunal n’a point été ouvert. Quant aux nouvelles militaires, elles sont toutes contradictoires. Aujourd’hui, le bruit court qu’une sortie générale de l’armée de Paris a eu lieu, et on s’attend à quelque combat décisif d’ici à peu. Que Dieu veuille, s’il en est ainsi, qu’il soit en notre faveur, et surtout qu’il change notre affreuse position….. Samedi, le prince royal de Prusse[2] est venu visiter la Bibliothèque ; j’ai pu descendre un instant en robe de chambre. Il a été on ne peut plus aimable et gracieux. Point d’autres nouvelles.

  1. a et b En blanc dans le texte.
  2. Le Prince Royal, né en 1831, plus tard roi de Prusse et Empereur sous le nom de Frédéric iii, père de l’ex-Kaiser Guillaume ii.