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Page:Revue de l'histoire de Versailles et de Seine-et-Oise, année 1919.djvu/197

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madame de pompadour

embûches du Roi de Prusse, en faveur d’un accord séparé avec la France[1]. Sous le coup d’un vif dépit, et comme pour se prévaloir d’un zèle ardent à affronter ce redoutable adversaire, ou tout au moins à soutenir, par une diversion sur les États Prussiens, les mouvements du Prince de Soubise sur la Saala, il n’hésita pas à jeter sur Halberstadt les 112 bataillons et les 127 escadrons qu’il avait amené du Duché de Brême. C’était singulièrement outrepasser ses instructions, et peut-être même se fût-il cru libre désormais de toute autre obligation sans l’ordre réitéré du Roi de constituer le renfort qu’on lui avait demandé pour le Prince de Soubise, et qu’il réduisit de son autorité à 18 escadrons et 22 bataillons.

Au fond, de qui venait donc l’idée d’occuper Halberstadt, sinon de Duverney, qui, depuis l’ouverture de la campagne, ne cessait de représenter cette place comme la base indispensable pour faire le siège de Magdebourg au printemps prochain. Halberstadt se trouvait malheureusement dépourvue de défenses sérieuses, et Richelieu, qui avait adopté le projet, moins pour ajouter à la gloire de ses précédentes campagnes que pour s’éviter le léger désagrément d’envoyer à une autre armée un détachement de la sienne, avait beau reconnaître un peu tard « qu’il fallait, de l’avis du Génie et de l’Artillerie, au moins trois mois et six mille travailleurs pour la mettre en état de résister à un coup de main », qu’importait à Duverney ? « En dût-il coûter un million, — écrivait-il le 12 octobre à un Lieutenant-Général employé à cette armée et ami commun aux deux plaideurs, — je voudrais fortifier Halberstadt, y mettre si cela était nécessaire cent pièces de canon… Le seul appareil de cette disposition serait capable d’en imposer au Roi de Prusse de manière à nous laisser tranquilles pendant le quartier d’hiver. Si l’on n’occupe pas Halberstadt, M. de Soubise ne saurait prendre ses quartiers dans le bas de la Saala, et nous verrons des armées, dont le fond est de plus de cent quarante mille hommes, culbutées, renversées et mises dans le désordre ppar une armée de quarante mille[2]. » Sans toujours présenter

  1. Plate tentative du Roi de Prusse qui craignait qu’après la convention, Richelieu ne se portât sur ses États et dont la Cour repoussa aussitôt l’objet.
  2. Correspondance Duverney-Dumesnil (Dépôt de la Guerre. — Archives historiques).