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Page:Revue de l'histoire de Versailles et de Seine-et-Oise, année 1919.djvu/375

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augusta holmès.


Mais quand vous avez eu le triomphe insolite,
L’éclat inusité,
Cet encouragement banal et vain, bien vite,
De vous s’est écarté.

Et vous avez senti le frisson de la haine
Qui, seule dans le ciel,
N’a que l’azur immense autour d’elle, et l’abîme,
Et l’hiver éternel.

On craint les forts : celui qui dompte la chimère
Est toujours détesté.
La haine est le plus grand hommage, soyez fière
De l’avoir mérité.

« Un homme, disait-elle souvent, ne se doute pas du courage que doit avoir une femme pour vivre. » Ce mot en dit long sur la profondeur des déceptions qu’éprouva sa nature droite au contact de la méchanceté des hommes. Jamais pourtant, à aucun moment, le désespoir n’eut prise, ou du moins barre sur elle. Et l’on doit reconnaître — et l’on a reconnu — qu’elle opposa à la mauvaise fortune une âme forte et fière. Bien plus, au moment où elle eût pu succomber sous le faix des tristesses, elle trouvait des accents pour consoler les autres : « Ne vous désolez donc pas toujours, écrivait-elle en 1902, huit mois avant sa mort, à une amie éprouvée. Songez combien vous êtes heureuse au regard des vrais malheureux de ce monde ! Vous êtes seule, vous êtes libre, vous avez une maison, vous avez de quoi vivre ! Quatre bonheurs inappréciables et que bien peu possèdent à la fois. Et qui vous force à être la triste solitaire ? Venez plus souvent voir vos amis, puisque — cinquième bonheur — vous n’avez rien à faire. Décidément, chère amie, vous tournez à l’hypocondrie. Il faut vous sortir de ça, — car cela gâte la vie. » Certes, il y a bien de la mélancolie dans cette énumération des bonheurs qui la fuient, mais, aussitôt, quel ressort ! Jusqu’à des projets qui la sollicitent et fermentent en elle, — et « si multiples, — écrit-elle, — qu’ils ne peuvent être exposés dans une lettre ».

Elle connut encore quelques succès isolés, et je trouve dans sa correspondance inédite trace des ovations qu’en juin 1899 réserva la ville de Tours à un concert de ses œuvres[1]. L’on

  1. « Véritable triomphe, écrit-elle, et une palme splendide. La plus belle de